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Les paysages


Un grain sur les rizières - ©Eric Mathieu

La richesse et la diversité des paysages sont infinies, elles sont changeantes, variant au cours des journées selon les lumières, les brumes, les grains et les couleurs les plus vives s'estompent parfois en pastels bigarrés ou en aquarelles effilochées ; les reflets, les ombres dansent différemment chaque instant sous le regard des crêtes déchiquetées du massif du Marojejy où s'accumulent les nuages, pattes de mouches blanchies sur le bleuté des versants abrupts.

La région d'Andapa est un recueillement pour les yeux, la verdeur incandescente est omniprésente, comme une ferveur inhérente à chaque recoin de paysage ; la gamme étendue des verts sans limite, passe de reflets jaunes paille à des touches bleutées ou dans l'inquiète obscurité des forêts, la kyrielle de mousses s'étalent aux pieds jusqu'aux plus hautes altitudes où s'offrent encore à l'esprit béat devant la magnificence des points de vue, de chaque colline, de chaque montagne, de nouvelles vallées, de nouveaux horizons. Comme si des contrées inexplorées s'offraient en cascade aux yeux aventuriers, comme si l'on se plaisait à dessiner de nouveaux itinéraires, tracer de nouvelles routes louvoyant au fil des rivières, tourmentées comme les torrents, souples et molles comme des collines arrondies se succédant.

La lumière arase du soleil couchant dévoile aux ombres allongées et allanguies des reflets insoupçonnés, la violence soudaine des grains parsème ses semonces d'orages cristallisant de ses éclairs le ciel alors plombé de noir et de grisaille. De ces instants où dès la fin de trombes d'eau, le silence s'efface au son des grenouilles, des grillons et des animaux en fête de ces sources nouvelles de vie que la nature leur a providentiellement octroyées.


Le grain menace ou s'efface... - ©Eric Mathieu

Madagascar se pare souvent d'un habit de pays photogénique, de par la variété de ses populations, de par ses différences étonnantes trouvées parfois sans guère se déplacer. Terre de contrastes, de lumières et parfois même de stupéfactions, la grande île est un monument à l'honneur de la nature et de ceux qui aiment la contempler, visiteurs d'un jour, photographes de toujours.

Andapa, creuset magique dans lequel on retrouve la quintessence des nuances de la forêt tropicale de montagne, de la civilisation installée en son sein, du regroupement d'ethnies des quatre coins de l'île comme une mosaïque d'humanité fusionnée, est un écrin dans lequel s'épanouit la vie de tout un peuple souvent arc-bouté sur ses rizières, les pieds dans la boue et le sourire aux lèvres. Sous le soleil éclatant de février lorsque les pousses tendres du jeune riz se brassent véhémentes, sous les suffoquantes fumées des brûlis de novembre lorsque du soleil ne reste plus qu'une pâle sphère orangée aux contours indéfinis, sous la brume fraîche et piquante de juillet où, aux premières heures de l'aube, les zébus de l'Androna débarquent en troupeaux des montagnes de l'Ouest ; Andapa est ce kaléïdoscope enivrant où l'oeil curieux voit la beauté, la passion et où s'égare l'oeil paresseux de l'être refermé sur lui-même ou trop dépendant d'autres horizons.

Alors à ceux qui pensent que Andapa n'est 'qu'une ville poussiéreuse sans intérêt', il est certes vrai que les activités ne sont guère nombreuses, le spectable est pourtant permanent, volubile et démonstratif. Aucun regard vagabond n'oserait ignorer l'écoulement béat de satisfaction des rivières, véritable condition sine qua non de la fertiilité locale, la nonchalante douceur des soirées où la lune étale ses pâles lueurs sur la vallée endormie. Le grésillement des grillons abandonnés, la stupeur des grenouilles arboricoles qui de leur vert fluorescent s'immiscent discrètes au sein des feuillages humides, des épanchements musicaux d'engoulevents cherchant leur proie la nuit au-dessus des toîts des maisons silencieuses, des cris de l'effraie qui perturbe le sommeil des enfants... Plus encore que de simples paysages, la région d'Andapa est un univers absorbant, captivant ne laissant en aucun cas les sens insensibles.


Cascade au sud d'Andapa - ©Eric Mathieu

En remontant un peu les pentes des rivières, on retrouve torrents et cascades, généreux et impétueux, traçant leur route à travers les reliquats de végétation, les bribes de forêt intacte, un chemin d'incertitude pourtant rempli de conviction et d'obstination. Les chemins d'eaux qui drainent cette région comme le feraient les vaisseaux du corps humain, apportent au prestigieux édifice qu'est ce bassin versant les forces nécessaires à sa pérennité.

Quand bien même les cyclones, les intempéries, les éboulements viendraient à s'abattre sur ce lieu qu'en son sein même la nature trouverait le remède à ses propres maux. Pourtant il n'est nul besoin d'être prophète pour constater à quel point l'influence humaine réduit chaque jour un peu plus ces contrées étonnantes. Pris dans l'étau d'une pression démographique et d'une économie à soubresauts plutôt chaotiques, on ne sait pas ce qui pourra être sauvé, pas demain, pas après-demain, mais dans une, voire deux générations. Que restera-t-il de ce qui fut sans doute un jour le joyau d'une nature jamais avare d'ingéniosité dans sa création ?

Comme le professeur Humbert lorsqu'il entreprit l'exploration du massif de Marojejy en 1948, il n'est de jour sans nouvelles découvertes, les richesses naturelles, géologiques, faunistiques ou floristiques sont telles qu'elles ne laissent aucun répit à celui qui veut s'en approcher. Ce petit paradis ne se lassera jamais d'accueillir les insatiables nomades en mal de contemplations.

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Le massif du Marojejy dans sa splendeur matinale - ©Eric Mathieu

 


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